2014 - mai

2014 - mai

17 mai 20h30
Cathédrale Saint-Sauveur - Aix-en-Provence

24 mai & 25 mai - 17h
Chapelle du Sacré-Coeur - Aix-en-Provence

Rémi Albertini, ténor
Augustin Escalante, basse
Orchestre de chambre de Marseille

Par tradition familiale - quatre générations d'organistes et de maîtres de chapelle s'étaient succédées à Lucques dans sa famille - le jeune Giacomo Puccini était destiné à tenir l'orgue et à accompagner les offices au Duomo San Martino de sa ville natale. En réalité, le futur compositeur de Tosca avait reçu adolescent le virus de l'opéra en assistant à une représentation d'Aïda à Pise en 1876. Avant de quitter l'Eglise et Lucques pour se consacrer à l'art lyrique, Puccini n'en écrivit pas moins une grande Messe à quatre voix et orchestre dans laquelle il intégra deux motets composés auparavant et qui fut créée le 12 juillet 1880 pour la fête de San Paolino, patron de la cité toscane. 

Car si Puccini est surtout célèbre pour ses opéras, qu’il commence à composer à partir de 1883, le Motet « Plaudite populi » dédié à San Paolino, premier évêque de Lucques, est la première œuvre composée par lui, en 1877, dans le cadre de la formation musicale reçue dans sa ville natale à l’Istituto Musicale e Capella del Commune, dit aussi Institut Pacini qu’il fréquenta entre 1871 et 1880. Parmi les services religieux auxquels devaient participer les élèves, se trouvait, en effet, la fête de San Paolino –le 12 juillet- pour laquelle le plus doué d’entre eux devait composer trois services « de genre ecclésiastique ou théâtral » sous la forme d’un Motet exécuté après la procession, d’une Messe solennelle pour l’église San Paolino e Donato, et d’un service de Vêpres. Ces pièces étaient également exécutées par les élèves de l’Institut.
La Messa di Gloria –de son nom originel « Messa a 4 voci con orchestra »- et le Motteto « Plaudite populi » doivent donc se concevoir comme une seule composition, même si quelques années les séparent, qui utilise une même orchestration.
Le texte du Motet, choisi par Puccini, est anonyme et non daté. Il est ici utilisé comme on le fait pour les Psaumes, dans une fonction essentiellement célébrative, d’où la répétition des couplets. Les interventions du chœur ainsi que la tonalité de départ –en La bémol majeur- sont destinées à produire une impression de magnificence, cependant que le cœur du motet, représenté par le solo du baryton, est plus intime et contrasté tout en offrant au soliste la possibilité d’explorer les limites de son registre. On retrouve cette forme de composition dans la Messa, notamment dans le Gloria où figurent les pages les plus lyriques de l’œuvre.

Il s'agit donc du tout premier ouvrage d'envergure de Puccini qui, d'emblée, montrait des dons réels pour l'écriture vocale et l'orchestration mais aussi sa faculté de se référer aux aînés (Rossini, Bellini, Verdi) et son goût pour le théâtre lyrique. Certes la Messa comporte son lot de passages fugués (le début du Kyrie, le « Cum sancto spiritu » du Gloria, etc.), fruits de solides années d'études. Mais pour le reste, plus qu'à une cérémonie liturgique, elle s'apparente à une grande page profane et décorative où l'on entend l'écho de la marche de Nabucco de Verdi (le « Qui tollis peccata mundi » dans le Gloria) et où le ténor solo peut s'épancher dans un véritable air d'opéra (« Gratias agimus » du Gloria).
Puccini était bien conscient du caractère plus théâtral que sacré de sa messe : il réutilisa ultérieurement le Kyrie dans son opéra Edgardo et surtout le délicieux Agnus Dei, qui clôt l'œuvre dans un étrange climat de divertissement de salon, devint, pratiquement inchangé, le fameux madrigal de l'acte I de Manon Lescaut.
De telles dérives profanes n'enlèvent rien à la qualité purement musicale de la Messe qui eut son petit succès local à sa création. On comprend d'autant moins pourquoi Puccini la rangea dans ses cartons et ne la fit jamais éditer. Il faudra attendre le début des années 1950 pour que l'œuvre soit découverte et connaisse sa deuxième exécution d'ailleurs triomphale ! C'est alors seulement qu'elle fut baptisée, on ne sait pourquoi, « Messa Di Gloria », titre qui n'était pas dans les intentions de l'auteur.